Jean Gilles (1668-1705), Requiem, Introitus
Choeur et orchestre de La Chapelle Royale, dir. Philippe Herreweghe 1

Pieter Brueghel l’Ancien (~1525-1569)
Le Triomphe de la Mort (1562)
Musée du Prado, Madrid
De 1347 à 1349, la Grande Peste ravage l’Europe. La population européenne est réduite de moitié. Sans atteindre la même ampleur, le phénomène s’est répété à plusieurs reprises jusqu’au XVIe siècle. Ces événements jouent un rôle dans l’émergence d’une fascination pour les thèmes macabres. Mais ils ont été aussi instrumentalisés par l’Église pour susciter une peur de la damnation. Au départ, ils illustrent le sentiment d’un échec individuel. L’impuissance de l’homme est rattachée à la mort et au pourrissement physique. Ce rapprochement entre la mort et l’échec fait naître un sentiment de mélancolie, de regret de la vie fragile et précieuse, mais pas une peur de la mort.
Le paysage

Le paysage est ravagé, entièrement dans les tons ocres. la présence d’une étendue d’eau à l’arrière-plan, tout semble desséché. L’horizon laisse entrevoir, par delà une barre montagneuse, des incendies multiples, peut-être une éruption.

Au second plan, un étrange élément d’architecture est à l’état de ruine. Le sol est jonché de carcasses d’animaux morts. Des corbeaux planent sur la scène.
La représentation de la mort


De manière générale, on peut noter l’aspect théâtral de la mise en scène, qui évoque l’Ommergang, une fête des Pays-Bas intégrant un défilé autour de la mort. Ainsi la forteresse à roues, derrière le cheval décharné, peut rappeler le char nommé Hellewagen (char de l’enfer). Un second char serait la carriole chargée de crânes.


La mort est présente sous les formes les plus diverses. Les incendies, au loin. Les navires qui coulent, dans la mer. Des pendus et des roués dont les roues se confondent avec les arbres décharnés.




La mort s’incarne surtout par des armées de squelettes : on trouve des cavaliers, des fantassins, des squelettes armés de filets,



des bourreaux, des fossoyeurs, des convoyeurs à la mine mélancolique qui transportent une charrette pleine de crânes.

Le plus emblématique est sûrement le cavalier muni d’une grande faux,qui poursuit la foule sur un cheval squelettique, qui évoque les chevaux de l’Apocalypse.

Des squelettes en train de jouer de la trompette évoquent également l’Apocalypse.

On trouve aussi une représentation allégorique de la mort constituée par deux des trois Parques, qui dans la mythologie gréco-romaine, ont la fonction de couper le fil de la vie. On voit en effet deux femmes étendues sur le sol, l’une piétinée par le charriot rempli de crânes. Cette dernière tient des ciseaux, alors que sa comparse tient un fuseau.
Les attitudes devant la mort


Toute résistance est vaine. Les bons chrétiens se réfugient en masse dans un enclos dont la porte est marquée d’une croix : ils se jettent en fait dans une souricière dont la trappe ne manquera pas de se refermer. Vainement, un moine en appelle au ciel.


Un homme tire courageusement son épée pour entamer un combat perdu d’avance. Un autre, plus lâche, tente de se cacher sous une table. Un autre encore tente de s’abriter dans le creux d’un arbre et est rattrapé par une flèche.
L’universalité de la mort

La mort n’épargne personne. Un roi couvert de pourpre, qui tient encore son sceptre, est tiré par un premier squelette qui exhibe un sablier indiquant au puissant que son temps est écoulé, tandis qu’un second, vêtu d’une armure, s’empare de ses richesses. Un cardinal effondré est soutenu par un autre squelette, cardinal aussi.


L’homme en gris et noir qui est précipité dans l’étang pourrait bien être Calvin : l’Église protestante n’est pas épargnée. Une courtisane effrayée est enlacée par un squelette.

Certains tentent d’oublier, comme ces amants qui jouent de la musique sans s’apercevoir qu’ils sont accompagnés au violon par un squelette. On peut noter que Bruegel laisse transparaître ici une conception pessimiste de l’amour : celui-ci est vénal - la courtisane a étalé des pièces de monnaies sur la table - et inconstant - la robe bleu de la maîtresse du musicien en est le symbole.
Introitus
IV Es 2
34 Requiem aeternam dona eis, Domine :
et lux perpetua luceat eis.
Ps 64, 2-3
2 Te decet hymnus, Deus, in Sion :
et tibi reddetur votum in Ierusalem.
3 Exaudi orationem meam
ad te omnis caro veniet.
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IV Es 2
34 Accorde-leur le repos éternel, Seigneur :
et que brille sur eux la lumière sans déclin.
Ps 64, 2-3
2 Il est beau de te louer, Dieu, en Sion :
à toi il sera rendu hommage à Jérusalem.
3 Tu écoutes ma prière.
Toute chair vient jusqu’à toi.
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1Agnes Mellon, soprano
Howard Crook et Herve Lamy, ténors
Peter Kooy, basse