
Dès que l’amour entre dans ton cœur,
tes pensées deviennent claires comme la lumière.
Oui, ton intelligence s’ouvre aux mystères de Dieu.
Les bonnes actions
plaisent à ceux qui le font.
Mais si tu les fais sans amour,
elles ne te plaisent pas.
Le sel rend la nourriture meilleure.
De même pour faire de bonnes actions,
il faut aimer.
On peut comparer les bonnes actions aux membres de ton corps.
L’amour, c’est le cœur qui rend ton corps vivant.
Se priver de nourriture, c’est bien.
Mais si tu jeûnes sans amour,
tu gardes une mauvaise odeur dans ta bouche.
Ton jeûne ne sert à rien.
Ta prière est agréable,
et l’amour te donne des ailes
pour voler comme un oiseau.
Mais si ton aile est faible,
tu ne verras pas le Dieu Très-Haut
là où il habite.
Être juste est une bonne chose
pour celui qui pratique la justice.
Mais si tu es juste sans amour,
tu te fatigues pour rien.
Si tu gardes ton corps pour le Seigneur,
si tu lui appartiens,
tu recevras une glorieuse récompense.
Mais si tu n’aimes pas,
tu es comme un homme marié
qui trompe sa femme.
Si tu partages ton pain avec celui qui a faim,
tu recevras une récompense.
Mais si tu partages ton pain sans amour,
tu ne gagnes rien.
Si le martyr donne son corps au feu pour être brûlé,
il a besoin d’aimer.
Alors il recevra la récompense des martyrs.
Aimer est plus important
que de parler au nom de Dieu
et de croire en lui.
En effet, sans amour,
tu ne peux pas parler au nom de Dieu
et tu ne crois pas en lui.
Jacques de Saroug (451-521), Poème sur l’amour
Biographie
Nous connaissons Jacques de Saroug essentiellement grâce à son contemporain Jacques d’Edesse. Né en 451 à Haura sur l’Euphrate, Jacques étudia à l’école d’Edesse qui jouissait d’un grand renom. A 22 ans, il devint moine et se mit vite à transcrire sa méditation des Écritures en poèmes religieux d’une rare beauté.
Ordonné prêtre, Jacques devint aussitôt visiteur ecclésiastique de l’église locale d’Harra ; ce fut ainsi pour lui l’occasion de connaître toute la Syrie. Vers la fin de sa vie, il fut élu évêque de Batnan, en 518. Jacques mourut le 29 novembre 521 ; en raison de ses dons peu communs d’écrivain, l’Église syriaque lui octroie le titre de « harpe de l’Esprit saint », à l’égal de son maître saint Ephrem.
Des 763 poèmes qu’il composa, un tiers à peine nous est parvenu. Jacques y chante, en de fréquents renvois pleins de sagesse aux Écritures juives et chrétiennes, la beauté de l’agir de Dieu dans l’histoire, symboliquement reflétée dans le regard miséricordieux de Dieu qui nous est révélé sur le visage du Christ.