Pie­ter Brue­ghel l’An­cien. Pay­sages d’hiver

Jo­hann Her­mann Schein (1586-1630), Al­le­mande
En­semble Le Ban­quet du Roy 1

Pie­ter Brue­ghel l’Ancien (1525-1569)
Pay­sage d’­hi­ver avec pa­ti­neurs et trappe à oi­seaux (1565)
Mu­sée Royaux des Beaux-Arts, Bruxelles

Brue­gel est l’un des pre­miers à re­pré­sen­ter l’­hi­ver en ta­bleaux mo­nu­men­taux, in­sis­tant sur la re­pré­sen­ta­tion de la neige. Avec lui, l’­hi­ver de­vient un sujet. 

Pay­sage d’­hi­ver avec des pa­ti­neurs et une trappe pour oi­seaux, a été peint en 1565. L’­hi­ver 1564-1565 a été par­ti­cu­liè­re­ment ri­gou­reux. Les té­moi­gnages écrits sont una­nimes à cet égard.

La Trappe aux oi­seaux de Pie­ter Brue­ghel est l’une des com­po­si­tions les plus po­pu­laires de la tra­di­tion pay­sa­gère néer­lan­daise et l’une des œuvres les plus connues de la fa­mille Brue­ghel, elle existe dans plus de 120 ver­sions. Le thème du pay­sage hi­ver­nal, et en par­ti­cu­lier ce­lui des pa­ti­neurs sur glace, a sou­vent été pro­po­sé pour re­pré­sen­ter la pré­ca­ri­té de la vie : en ef­fet, un tel thème est même ins­crit sur une gra­vure d’a­près Pie­ter Brue­gel l’An­cien re­pré­sen­tant un pay­sage hi­ver­nal avec des pa­ti­neurs sur glace de­vant la Porte Saint-Georges d’An­vers : « Lu­bri­ci­tas Vi­tae Hu­ma­nae » (In­sé­cu­ri­té de l’exis­tence hu­maine). Des al­lu­sions sous-ja­centes si­mi­laires sont bien do­cu­men­tées dans l’œuvre de Brue­gel l’An­cien. Le piège à oi­seaux, ce­pen­dant, est do­té d’un as­pect poi­gnant. Au-de­là du pay­sage et de l’am­biance, par l’a­jout du thème sym­bo­lique : l’in­no­cence des oi­seaux face à la me­nace du piège, re­flé­té par le jeu in­sou­ciant des pa­ti­neurs sur la glace fragile. 

Le ta­bleau est prin­ci­pa­le­ment peint en blanc, beige clair et bleuâtre. Il montre un pay­sage hi­ver­nal en­nei­gé. Le tiers su­pé­rieur de l’i­mage est oc­cu­pé par le ciel. À l’­ho­ri­zon, la plaine en­nei­gée avec au loin­tain la sil­houette d’une ville. Le fond est en­ca­dré par un pay­sage de vil­lage, com­po­sé d’une dou­zaine de mai­sons rou­geâtres et d’une église, le tout avec des toits en­nei­gés. Le vil­lage a été iden­ti­fié comme étant Pède-Ste-Anne dans le Bra­bant, dont l’é­glise go­thique est éga­le­ment re­pré­sen­tée dans Der Blin­dens­turz (La chute des aveugles) de Brue­gel. La sil­houette de la ville en ar­rière-plan se­rait celle d’Anvers.

Tout le pay­sage est cou­vert d’arbres nus. Le pre­mier plan est di­vi­sé en deux scènes : à gauche, sur un peu plus de la moi­tié de la lar­geur de l’i­mage, de nom­breuses per­sonnes s’a­musent sur la glace d’une ri­vière ge­lée. Le cô­té droit de l’i­mage montre des oi­seaux au­tour d’un tré­bu­chet à oi­seaux sur la berge. Les gens sont épar­pillés sur la glace seuls ou en pe­tits groupes, ils pa­tinent ou jouent. Par­fois vê­tus de rouge vif, ils se dis­tinguent net­te­ment de l’en­vi­ron­ne­ment lu­mi­neux, presque mo­no­chrome. Sur la rive droite de la ri­vière, il y a aus­si des arbres sombres aux branches nues re­cou­vertes de neige. Au des­sous, plu­sieurs buis­sons font saillie dans l’i­mage. Un grand arbre at­teint le bord su­pé­rieur de l’i­mage. Vers la droite et lé­gè­re­ment en avant, la trappe à oi­seaux qui donne son nom à la com­po­si­tion. Dans le voi­si­nage im­mé­diat, plu­sieurs oi­seaux noirs pi­corent dans la neige, tan­dis que d’autres sont im­mo­biles sur les branches des plantes environnantes.

Quel que soit le pro­to­type, la beau­té dis­tinc­tive de la com­po­si­tion reste in­con­tes­tée. La scène est l’une des pre­mières re­pré­sen­ta­tions pures du pay­sage hol­lan­dais et l’une des fi­gures em­blé­ma­tiques de l’­his­toire de l’art. En ef­fet, c’est peut-être la scène la plus ex­pres­sive de toutes les com­po­si­tions de ce genre, en rai­son de l’in­tro­duc­tion du thème des pièges à oi­seaux en pré­sence des vil­la­geois qui jouent sur la glace.

© Wi­ki­pé­dia

Pie­ter Brue­ghel l’Ancien (1525-1569)
Le dé­nom­bre­ment de Beth­léem (1566)
Mu­sée Royaux des Beaux-Arts, Bruxelles

On ne voit pas tout de suite qu’il s’a­git d’un scène bi­blique, puis on dé­couvre peu à peu Jo­seph et Ma­rie qui vont ins­crire leur en­fant au re­cen­se­ment. Il s’a­git d’un sup­port à la mé­di­ta­tion sur le pè­le­ri­nage de la vie, cette exis­tence se­mée d’embûches qu’il faut évi­ter pour ac­cé­der à la mai­son de Dieu. La voie du Sei­gneur est ici re­pré­sen­tée par Ma­rie et Joseph. 

Pie­ter Brue­ghel l’Ancien (1525-1569)
Chas­seurs dans la neige (1565)
Kuns­this­to­risches Mu­seum, Vienne

Ce ta­bleau hi­ver­nal de Breu­ghel l’An­cien est le plus cé­lèbre des pay­sages de neige de toute l’­his­toire de la pein­ture. Les flo­cons ne tombent pas, comme dans d’autres ta­bleaux, mais de nom­breuses nuances de blanc, où do­minent les teintes vertes, sug­gèrent avec vrai­sem­blance l’at­mo­sphère d’une cam­pagne en­nei­gée de­puis fort long­temps. Toits, branches d’arbres et murs per­mettent au peintre de confé­rer à la neige des qua­li­tés plas­tiques. Au pre­mier rang, il dis­pose des ronces qui percent le man­teau nei­geux et en laissent de­vi­ner le poids. S’en re­ve­nant de la chasse avec leurs chiens, des hommes laissent dans la neige de pro­fondes traces de pas. Leur des­cente vers la val­lée ac­com­pagne le re­gard du spec­ta­teur qui y dé­couvre une mul­ti­tude de scènes hi­ver­nales : de di­vers jeux sur un étang ge­lé, à un feu de che­mi­née. À l’­ho­ri­zon, sur la droite, des ro­chers es­car­pés font contre­point à la dia­go­nale de la col­line au pre­mier plan et marquent de leurs formes mi­né­rales le ca­rac­tère re­bu­tant de l’hiver.

Le ta­bleau est si­gné en bas au mi­lieu avec « BR­VE­GEL. M.D.LXV ».

L’­hi­ver 1565 aux Pays-Bas est rude, mar­qué par d’im­por­tantes chutes de neige, on rap­porte ain­si que « les che­vaux en ont jus­qu’au ventre ». Le ta­bleau Des chas­seurs dans la neige dé­bute ce qui se­ra un thème ma­jeur de la pein­ture fla­mande : le cli­mat. Mais comme la plu­part des re­pré­sen­ta­tions hi­ver­nales du siècle d’or hol­lan­dais, la peine ou la mi­sère en­gen­drées par ces condi­tions mé­téo­ro­lo­giques n’ap­pa­raissent pas.

Ce ta­bleau fait par­tie d’une sé­rie de six, illus­trant les six sai­sons que l’on dis­tin­guait alors aux Pays-Bas : dé­but du prin­temps, prin­temps, dé­but de l’é­té, été, au­tomne et en­fin hi­ver, sur ce ta­bleau qui re­pré­sente les mois de dé­cembre et de jan­vier. En tout cinq ta­bleaux sont conser­vés. La Jour­née sombre (avant prin­temps) et La Ren­trée des trou­peaux (au­tomne) sont au Kuns­this­to­risches Mu­seum de Vienne ; La Fe­nai­son (dé­but de l’é­té) est ex­po­sée au Pa­lais Lob­ko­witz du châ­teau de Prague et La Mois­son (Été) au Me­tro­po­li­tan Mu­seum of Art de New York

Brue­gel a réa­li­sé la sé­rie pour le col­lec­tion­neur d’art Ni­claes Jon­ghe­linck à An­vers. En 1594, elle été of­ferte en ca­deau à Er­nest d’Au­triche. Dans l’in­ven­taire de son hé­ri­tage du 17 juillet 1595, les ta­bleaux sont dé­fi­nis comme six pan­neaux des 12 mois de Jars von Brue­gel. En­suite ils ont pro­ba­ble­ment fait par­tie de la col­lec­tion de Ro­dolphe II de Habs­bourg à Prague. Il est cer­tain qu’en 1659 ils étaient ins­crits à l’in­ven­taire de la col­lec­tion de Léo­pold-Guillaume de Habs­bourg au Stall­burg de Vienne. En­suite la trace est per­due. Ce n’est que dans le ca­ta­logue de 1884 qu’il est no­té que le ta­bleau est pré­sent au dé­pôt et que par consé­quent il n’y était pas au­pa­ra­vant.
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1 Be­noît Tain­tu­rier, cor­net à bou­quin
Yan­nick Le­bos­sé, gui­terne
Em­ma­nuel Vi­gne­ron, dul­ciane
Oli­vier Gladho­fer, bom­barde
Adrien Re­bois­son, cha­lé­mie
Be­noît Le­comte, riqq