Kusnt­mu­seum Win­ter­thur. Ges­chich­ten in Gesichtern

Ja­cob Adriaensz Ba­cker (1608-1651)
Por­trait d’un gar­çon avec une hache (~1645)
> Kunst­mu­seum Win­ter­thur
Jus­qu’au 5 no­vembre 2023

Le théo­ri­cien de l’art et peintre néer­lan­dais Sa­muel van Hoog­stra­ten dé­cri­vait le vi­sage hu­main comme un « mi­roir de l’es­prit ». Il es­ti­mait même que le ca­rac­tère d’une per­sonne pou­vait se lire sur ses traits. Les vi­sages jouent éga­le­ment un rôle im­por­tant dans la pein­ture. Ain­si, les vi­sages peints aux Pays-Bas au 17e siècle re­flètent de ma­nière im­pres­sion­nante de nom­breuses fa­cettes de la phy­sio­no­mie hu­maine dans le por­trait in­di­vi­duel. De même qu’ils s’ef­forcent de re­flé­ter in­di­vi­duel­le­ment la réa­li­té de la vie d’une per­son­na­li­té re­pré­sen­tée, ils peuvent, lors­qu’ils sont as­so­ciés, re­flé­ter l’­his­toire de toute une société.

In­dé­pen­dam­ment de la mis­sion re­pré­sen­ta­tive de l’art du por­trait, le vi­sage hu­main est de­ve­nu un thème de la pein­ture ba­roque hol­lan­daise. En tant que têtes de ca­rac­tère mar­quantes avec des traits de vi­sage pro­non­cés, un nou­veau type d’i­mages de per­son­nages s’est éta­bli : la « tro­nie » 1, qui si­gni­fiait tête, vi­sage ou ex­pres­sion. Les per­sonnes âgées et les jeunes vê­tus de vê­te­ments simples ou de cos­tumes ex­tra­va­gants, voire l’au­to-re­pré­sen­ta­tion d’un ar­tiste, étaient les su­jets pré­fé­rés, sans que les per­sonnes re­pré­sen­tées ne soient fixées sur un rôle et une iden­ti­té spécifiques. 

Les trônes ser­vaient de têtes d’é­tude aux ar­tistes, mais étaient éga­le­ment créés en tant que créa­tions pic­tu­rales au­to­nomes pour le mar­ché de l’art. Contrai­re­ment aux por­traits de classe, qui mettent en scène le sta­tut et le rang des mo­dèles en tant qu’œuvres de com­mande, les trônes ex­plorent le spectre de l’ex­pres­sion hu­maine. Leur réa­lisme et leur im­mé­dia­te­té sont d’une va­li­di­té qua­si­ment in­tem­po­relle, ce qui rend ces vi­sages peints avec vir­tuo­si­té en­core at­trayants et ac­tuels aujourd’hui.

L’ex­po­si­tion du ca­bi­net pré­sente pour la pre­mière fois le Por­trait d’un gar­çon à la hache de Ja­cob Ba­cker (1608-1651), ré­cem­ment ac­quis. Ce ta­bleau re­mar­qua­ble­ment conser­vé vient en­ri­chir les col­lec­tions du mu­sée d’un chef-d’œuvre d’un ar­tiste im­por­tant de l’en­tou­rage de Rem­brandt. Des ta­bleaux d’ar­tistes tels que Fer­di­nand Bol, Sa­muel van Hoog­stra­ten et Jan Lie­vens sont re­grou­pés au­tour de ce ta­bleau et pré­sen­tés dans un rap­port com­plexe avec une sé­lec­tion choi­sie de re­pré­sen­ta­tions d’­his­toire, de genre et d’au­to­por­traits de Rembrandt.

An­drea Lutz, conser­va­trice
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1 Tro­nie, dé­ri­vé du mot ita­lien « tro­no », « trône«
 Le terme « tro­nie » en pein­ture fait ré­fé­rence à un type spé­ci­fique de por­trait. Une tro­nie est un por­trait qui re­pré­sente une fi­gure as­sise sur un trône ou un siège d’­hon­neur. Ce style de por­trait était cou­ram­ment uti­li­sé dans l’art de la Re­nais­sance et du Ba­roque pour re­pré­sen­ter des per­son­nages im­por­tants tels que des rois, des reines, des saints ou des fi­gures bibliques.

Les tro­nies étaient sou­vent conçues pour sym­bo­li­ser la puis­sance, l’au­to­ri­té et le pres­tige de la per­sonne re­pré­sen­tée. Elles étaient ca­rac­té­ri­sées par une com­po­si­tion soi­gnée, met­tant en va­leur le trône or­né et les vê­te­ments somp­tueux du su­jet. Les tro­nies pou­vaient éga­le­ment in­clure des élé­ments sym­bo­liques ou des ac­ces­soires re­pré­sen­tant le sta­tut ou les at­tri­buts de la personne.

Un exemple cé­lèbre de tro­nie est le por­trait du pape In­no­cent X réa­li­sé par le peintre es­pa­gnol Die­go Veláz­quez. Dans ce ta­bleau, le pape est re­pré­sen­té as­sis sur un trône ri­che­ment dé­co­ré, avec une ex­pres­sion de puis­sance et de dignité.