G. W. F. He­gel. Re­non­cer à la violence

Mo­ritz Klin­kicht (1849-1932)
Georg Wil­helm Frie­drich He­gel, gra­vure sur bois (~1900)
Col­lec­tion privée 


L’état de na­ture est l’é­tat de ru­desse, de vio­lence et d’in­jus­tice. Il faut que les hommes sortent de cet état pour consti­tuer une so­cié­té qui soit un État, car c’est seule­ment là que la re­la­tion de droit pos­sède une ef­fec­tive réalité.

Éclair­cis­se­ment. On dé­crit sou­vent l’é­tat de na­ture comme un état par­fait de l’­homme, en ce qui concerne tant le bon­heur que la bon­té mo­rale. ll faut d’a­bord no­ter que l’in­no­cence est dé­pour­vue comme telle de toute va­leur mo­rale, dans la me­sure où elle est igno­rance du mal et tient à l’ab­sence des be­soins d’où peut naître la mé­chan­ce­té. D’autre part, cet état est bien plu­tôt ce­lui où règnent la vio­lence et l’in­jus­tice, pré­ci­sé­ment parce que les hommes ne s’y consi­dèrent que du seul point de vue de la na­ture. Or, de ce point de vue-là, ils sont in­égaux tout à la fois quant aux forces du corps et quant aux dis­po­si­tions de l’es­prit, et c’est par la vio­lence et la ruse qu’ils font va­loir l’un comme l’autre leur dif­fé­rence. Sans doute la rai­son ap­par­tient aus­si à l’é­tat de na­ture, mais c’est l’­élé­ment na­tu­rel qui a en lui pré­émi­nence. Il est donc in­dis­pen­sable que les hommes échappent à cet état pour ac­cé­der à un autre état, où pré­do­mine le vou­loir raisonnable.

Georg Wil­helm Frie­drich He­gel (1770-1831), Pro­pé­deu­tique phi­lo­so­phique, Doc­trine du droit, §. 25
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