Saint Au­gus­tin. Le des­sein de Dieu

Pie­tro di Gio­van­ni d’Am­bro­gio (1410-1449)
Saint Au­gus­tin (~1435)
Mu­sée Lin­de­nau, Altenbourg 


Dieu a fixé un temps pour ses pro­messes, et un temps pour ac­com­plir ce qu’il a pro­mis. Le temps des pro­messes était le temps des pro­phètes, jusqu’à Jean Bap­tiste ; mais à par­tir de ce­lui-ci et jusqu’à la fin, c’est le temps d’accomplir ce qui a été pro­mis. Il est fi­dèle, Dieu qui s’est fait notre dé­bi­teur, non en re­ce­vant quelque chose de nous, mais en nous pro­met­tant de si grandes choses. C’était peu de pro­mettre, il a vou­lu en­core s’engager par écrit, dres­sant avec nous comme un contrat de ses pro­messes ; ain­si, lorsqu’il com­men­ce­rait à s’en ac­quit­ter, nous pour­rions consi­dé­rer dans l’Écriture l’ordre où de­vrait se réa­li­ser ce qu’il a promis.

C’est pour­quoi, comme nous l’avons dé­jà dit sou­vent, le temps de la pro­phé­tie était la pré­dic­tion des pro­messes. Il a pro­mis le sa­lut éter­nel, une vie bien­heu­reuse sans fin avec les anges, et l’héritage qui ne peut se flé­trir, la gloire éter­nelle ; il a pro­mis la dou­ceur de son vi­sage, la de­meure de sa sain­te­té dans les cieux, et nulle crainte de mou­rir dé­sor­mais, puisque les morts res­sus­citent. C’est là comme sa pro­messe fi­nale vers la­quelle court tout notre élan ; et quand nous y se­rons par­ve­nus, nous n’aurons plus rien à re­cher­cher, plus rien à exiger.

Et dans ses pro­messes et ses an­nonces, il n’a pas tu le plan se­lon le­quel nous par­vien­drons à ce but fi­nal. En ef­fet, il a pro­mis aux hommes la di­vi­ni­té, aux mor­tels l’immortalité, aux pé­cheurs la jus­ti­fi­ca­tion, aux hu­mi­liés la glo­ri­fi­ca­tion. Tout ce qu’il a pro­mis, il l’a pro­mis à des gens qui n’en étaient pas dignes. De la sorte, ses pro­messes n’étaient pas comme le fruit d’une ré­com­pense, mais comme une grâce don­née gra­tui­te­ment, comme l’indique ce nom. Vrai­ment, mes frères, comme ce­la pa­rais­sait in­croyable aux hommes, ce que Dieu pro­met­tait : qu’à par­tir de cet état mor­tel où ils sont cor­rup­tibles, mé­pri­sables, faibles, pous­sière et cendre, ils de­vien­draient égaux aux anges de Dieu ! Aus­si Dieu ne s’est-il pas conten­té de faire avec les hommes le pacte de l’Écriture pour qu’ils croient, mais il a éta­bli un mé­dia­teur ga­rant de sa foi : non pas un prince, un ange ou un ar­change, mais son Fils unique. Ain­si de­vait-il mon­trer et don­ner par son Fils lui-même le che­min par le­quel il nous condui­rait à cette fin qu’il nous a pro­mise. Car c’était trop peu de chose pour Dieu que son Fils nous mon­trât le che­min ; il a fait de lui le che­min, par le­quel tu irais sous sa di­rec­tion, le che­min que tu suivrais.

Dieu a donc pro­mis que nous vien­drions jusqu’à lui, c’est-à-dire à cette inef­fable im­mor­ta­li­té et cette éga­li­té avec les Anges. Que nous en étions loin ! Lui si haut et nous si bas ! Nous étions ma­lades, sans es­poir de gué­ri­son. Un mé­de­cin a été en­voyé, le ma­lade ne l’a pas re­con­nu. « Car s’ils l’avaient connu, ja­mais ils n’auraient cru­ci­fié le Sei­gneur de gloire. » Mais que le ma­lade tue son mé­de­cin a été le re­mède du ma­lade. Le mé­de­cin était ve­nu le vi­si­ter et il a été tué pour le gué­rir. Il s’est fait re­con­naître aux croyants, Dieu et homme : Dieu qui nous a créés, homme qui nous a re­créés. Autre était ce qui ap­pa­rais­sait en lui, autre ce qui était ca­ché ; et ce qui était ca­ché l’emportait de beau­coup sur ce qui se voyait : ce qui l’emportait ne pou­vait se voir. Le ma­lade fut gué­ri par ce qui ne pou­vait se voir, pour de­ve­nir ca­pable de le voir plus tard ; Dieu re­tar­dait cette vi­sion en la ca­chant, il ne la re­fu­sait pas.

Saint Au­gus­tin (354 - 430), Sur le psaume 109, 1-3, CCL 40, 1601-1603
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